• Antoine Bourdelle (1861-1929)

  • 23,6 x 38,9 cm
  • 1882-1886
  • Plume et encre de Chine sur papier beige
  • MB d.1736
  • Paris, musée Bourdelle

La manière noire de Bourdelle fraye, plastiquement et intellectuellement, avec les tendances symbolistes qui, au seuil du XXe siècle, contribuèrent à réformer considérablement la peinture comme la sculpture européennes. A cet égard, Bourdelle participe, en 1892 puis en 1893, aux deux premiers Salons de la Rose-Croix, ces manifestations spiritualistes organisées par le Sâr Joséphin Péladan, grand ordonnateur d'un mouvement hermétique, théosophe occulte décidé à célébrer un Idéal majuscule, à « ruiner le réalisme ».
En 1892, l'artiste envoie le plâtre de La Douleur (1887), quatorze illustrations destinées à Césette, le roman populaire de son ami Emile Pouvillon et - reproduit au sein du catalogue illustré - ce dessin inspiré par sa sculpture L'Amour agonise (1886), une figure désormais aptère et revêtue d'un voile.
L'année suivante, le nom de Bourdelle figure sous trente et un numéros - une vingtaine de dessins pour une dizaine de sculptures.
Vincent Van Gogh, Georges Seurat, Odilon Redon, Georges Desvallières ou Félicien Rops ne sont jamais loin de ces sommeils létaux, de ces paysages désolés, de ces compositions crépusculaires purgées de toute anecdote, de toute espérance. Débarrassée des oripaux du naturalisme, dépouillée de toute description, l'œuvre répond à un effort de synthèse éminemment « moderne », au sens de Baudelaire, qui voyait dans ce terme la réunion du « transitoire » et de « l'éternel », du « fugitif » et de « l'immuable ».

Auteur de la notice : Colin Lemoine