• Antoine BOURDELLE (1861-1929)

     

  • 37,4 x 35,0 x 25,3 cm
  • 1929
  • Plâtre
  • MBPL2667
  • Exposé pour la première fois à Paris, 1961, Musée Bourdelle, " Têtes connues et inconnues par Bourdelle ", cat.1
  • Paris, musée Bourdelle

Si les autoportraits dessinés d’Antoine Bourdelle sont pléthore, les autoportraits sculptés sont peu nombreux, à moins de leur assimiler les quatre-vingts effigies de Beethoven, auquel Bourdelle s’est largement identifié.

En 1908, il se représente en pied, dans son costume de velours d’artiste-artisan, dans une statuette dénuée de bras. Vers 1916, il se figure en Musicien, jouant de l’orgue, tête renversée en arrière, puis réalise un impressionnant Autoportrait en clef de voûte pour l’Exposition internationale des Arts décoratifs et industriels modernes de 1925.

En 1929, éprouvant l’urgence de fixer son image, il exécute l’Autoportrait au chapeau et donne également ses propres traits au Cavalier de la Chimère et à Asclépios, deux œuvres ultimes.

La Galerie des Offices de Florence avait demandé à Bourdelle son buste pour sa célèbre Collection d'autoportraits, où les œuvres sculptées sont plus rares que les peintures. Débordé de commandes, il n’avait pas trouvé le temps de le réaliser. En 1929, la maladie l’éloigne des chantiers et l’oblige à modeler des œuvres de dimensions modestes. C’est alors qu’il réalise son autoportrait en buste.

Bourdelle s’est représenté dans sa tenue iconique, blouse à encolure étroite et fermeture déportée, qu’on voit sur les photographies (blouses d’atelier et vestes de costume étaient conçues sur le même modèle).  Sur son front immense, il arbore son feutre vert (MBCO581), reconnaissable au bourdalou à pompons[1], qu’il portait bord relevé (MBPH0076).

Mais le visage frappe surtout par son expression tragique : amaigri, l’ossature soulignée, les cernes creusées, l’œil gauche affaissé ; les yeux exorbités semblent déjà fixer un autre monde, comme un voyant. Les stigmates de la maladie l’ont marqué, comme le note le sculpteur Joachim Costa, lors d’une visite au Vésinet pendant l’été 1929: « Il a beaucoup maigri. Son masque est couleur de cire. Il y a dans ses yeux de l’anxiété et de l’espoir. »[2]

Cette effigie bouleversante est à rapprocher du dernier autoportrait peint (MBP044), dont Emile-François Julia a saisi toute la portée : « Enfin, préoccupé, semblait-il, de laisser le plus possible de lui-même avant son départ, d'une main fébrile et déjà traçant comme un message de l'au-delà, Bourdelle avait commencé une peinture tragique, un peu hallucinante, visage d'âme plus que de chair, émacié, creusé, déjà lointain : son propre portrait. »[3]

Ce visage en sursis, que Cléopâtre, sa veuve, refusa longtemps d’exposer, fut présenté pour la première fois en 1961, lors de l’exposition Têtes connues et inconnues du Musée Bourdelle.



[1] Large ruban qui garnit la base de la calotte d'un chapeau d'homme. Ici le bourdalou est constitué de deux cordelettes, formant deux coques, à liens flottants terminés en pompons.

[2] Joachim Costa, « Les Derniers jours de Bourdelle », L’Amour de l’Art, mars 1931, p. 119

[3] Emile-François Julia, Antoine Bourdelle, maître d'œuvre, Paris, 1930, p. 168

Médecin-major et critique d’art, Julia (1873-1935) appartenait au cercle amical de Bourdelle et lui vouait une admiration passionnée.

 

Autor de la nota : Valérie Montalbetti

Antoine BOURDELLE Bourdelle, Autoportrait au chapeau 1929 Plâtre  37,4 x 35,0 x 25,3 cm
  • Antoine BOURDELLE Bourdelle, Autoportrait au chapeau 1929 Plâtre  37,4 x 35,0 x 25,3 cm
  • Antoine BOURDELLE Bourdelle, Autoportrait au chapeau 1929 Plâtre  37,4 x 35,0 x 25,3 cm
  • Antoine BOURDELLE Bourdelle, Autoportrait au chapeau 1929 Plâtre  37,4 x 35,0 x 25,3 cm
  • MBCO581 : Anonyme, Chapeau d'Antoine Bourdelle en feutre vert, à bord étroit, feutre, 14 x 31 x 29,5 cm
  • MBPH0076 : Anonyme, Antoine Bourdelle sur le chantier de la Vierge à l'Offrande, 1922, tirage au gélatino-
  • MBP044 : Antoine Bourdelle, Bourdelle, dernier portrait, 1929, huile sur toile, 47 x 38 cm