Le colossal David aux bras levés tenant le glaive constitue un témoignage exceptionnel de la cathédrale médiévale de Reims. Ce plâtre est issu d’un moule pris sur une œuvre originale en pierre détruite.
Au-dessus de la grande rose de la façade occidentale de la cathédrale de Reims se trouvaient deux groupes en pierre illustrant le Combat de David contre Goliath : au Sud, David, armé d’une fronde, vient de lancer le caillou qui va abattre le géant Goliath ; au Nord, David brandit l’épée pour trancher la tête du géant.
En 1906, le service des Monuments Historiques décide de remplacer les figures originales abîmées par des copies en pierre. Elles sont alors moulées, probablement pour servir de modèle aux sculpteurs chargés de tailler les nouvelles statues, avant d’être détruites. La disparation de ces originaux en pierre fut dénoncée par Auguste Rodin, ou encore par le collectionneur Etienne Moreau-Nélaton, qui pointe le manque de ressemblance des nouvelles sculptures de David, photographies à l’appui.
François Haussaire, responsable d’une entreprise de décors et ornements religieux à Reims, récupère les épreuves en plâtre prises sur les originaux, et les vend à Bourdelle. Le David à la fronde est expédié en avril 1908, par train, en 3 caisses. Le David tenant le glaive est expédié en février 1909. Bourdelle l’installe dans l’atelier de peinture (MBPV3808 à MBPV3812), où il est demeuré.
Le 8 mars 1912, Bourdelle consacre aux David de Reims une magnifique leçon à l'Académie de la Grande Chaumière. L’œuvre rejoint les préoccupations formelles du sculpteur : « Et dans cette œuvre, la raison d'un très haut calcul n'entrave pas une seconde l'émotion de découverte des lois très humaines des formes. ». Lui, si attaché à la structure, affirme que seul un sculpteur médiéval est « capable de tailler de telles sculptures aussi puissamment architecturales ». Il conclut : « Ce David semble le mur lui-même tant il est architecture. »
Antoine Bourdelle nourrit un profond attachement pour la cathédrale de Reims : il emmène ses élèves la visiter et, outre les deux David, en possède de nombreux moulages, notamment des têtes de statues des portails (MBCO020 à MBCO027).
Lors de la destruction partielle de l’édifice en septembre 1914 sous les bombardements allemands, Bourdelle, au désespoir, réalise une série de dessins aquarellés : des anges tentent de parer la chute des pierres et des statues (par ex. MBD2533, MBD2545, MBD2558, MBD2568, MBD2589), ou déplorent leur destruction (par ex. MBD2540, MBD2565, MBD2591, MBD2615).
Valérie Montalbetti Kervella
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