Aux combattants : le premier monument

Né à Montauban en 1861, Antoine Bourdelle délaisse les études secondaires pour intégrer en 1876 l’école des beaux-arts de Toulouse. En 1884, le jeune homme est admis aux prestigieux Beaux-Arts de Paris, qu’il quitte deux ans plus tard, certain que son 
« école, c’est la rue ». À compter de 1885, il loue un atelier au 16 impasse du Maine (actuelle rue Antoine-Bourdelle), dans ce quartier de Montparnasse où se rencontre une bohème cosmopolite et désargentée.
Les premières années parisiennes sont laborieuses. S’il expose régulièrement dans les salons annuels, Bourdelle devient le praticien d’Auguste Rodin : entre 1893 et 1908, il est chargé de dégrossir des marbres pour le compte du célèbre sculpteur.
En 1895, Bourdelle est retenu par sa ville natale pour réaliser un Monument aux morts, aux combattants et serviteurs du Tarn-et-Garonne de 1870-1871. Inauguré en 1902, ce premier monument d’envergure assure à son auteur une grande visibilité. Il marque aussi une rupture avec l’héroïsme habituel des monuments aux morts.
Pour ses Combattants, qui dénoncent « l’amoncellement unique des charniers », Bourdelle multiplie les esquisses et variations, explore une esthétique du fragment et de l’assemblage. Corps athlétiques, quoique démembrés, gueules hurlantes, visages révulsés, bras crispés : Bourdelle élabore une syntaxe expressive, voire expressionniste, et photographie la gestation de son groupe.

Vue de la section Aux combattants, le premier Monument
photo Nicolas Borel
Antoine Bourdelle (1861-1929) Guerrier allongé au glaive. Étude pour le Monument au morts, aux combattants et serviteurs du Tarn-et-Garonne de 1870-1871, 1898-1900. Bronze, fonte Coubertin. Photo © Stéphane Piéra / musée Bourdelle / Paris Musées.

La main dépliée et la gueule hurlante, le corps parfaitement tendu vers un ennemi invisible, le guerrier s’escrime, seul. Cette figure nue, tout à la fois héroïque et dérisoire, dessine une diagonale saisissante, aussi graphique qu’une ombre. Bourdelle ne retient pas cette métaphore de l’assaut dans sa composition définitive, lui préférant le Grand Guerrier musculeux, avec son glaive brisé.

 

Antoine Bourdelle (1861-1929) La Guerre ou Trois Têtes hurlantes 
Étude pour le Monument aux combattants, aux morts et serviteurs du Tarn-et-Garonne de 1870-1871 1894-1899 
Bronze, fonte Coubertin 
Photographie © Eric Emo / musée Bourdelle / Paris Musées 

Yeux exorbités, gorges tendues et gueules béantes, les Trois Têtes hurlantes sont un assemblage d’études distinctes. Métaphore de l’effroi, ce groupe tricéphale fut exposé par Bourdelle au Salon de la Société nationale des Beaux-Arts de 1899. Une manière de « rendre impatient de voir entier et définitif le beau monument d’héroïsme et d’horreur » (Charles Saunier) que le sculpteur dévoile trois ans plus tard devant le Grand Palais à Paris, puis à Montauban.

 

Anonyme
Main désespérée 
Étude pour le Monument aux morts, aux combattants et serviteurs du Tarn-et-Garonne de 1870-1871 
Vers 1900 
Tirage gélatino-argentique 
Reproduction © ARCP / Mairie de Paris / Agathe Barisan, 2021

 

Attribué à Antoine Bourdelle (1861-1929) 
Guerriers. Trois études de têtes pour le Monument aux morts, aux combattants et serviteurs du Tarn-et-Garonne de 1870- 1871 
Vers 1898 
Tirage gélatino-argentique 
Reproduction © ARCP / Mairie de Paris / Agathe Barisan, 2021

 


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