Antoine Bourdelle collectionne avec ferveur les œuvres d’art médiévales. Le musée conserve plusieurs sculptures polychromées (recouvert de couches de peinture colorées), en bois ou en pierre. La figure de Saint Jean est issue d’un Calvaire : il s’agit d’une reproduction sculptée de la Crucifixion, c’est-à-dire de la mort sur la Croix de Jésus-Christ. Au pied de la Croix sont généralement représentés la Vierge Marie et Saint Jean.
L’apôtre, main droite sur le cœur, lève le regard vers le Christ. Il est vêtu d’un manteau à plis amples, fermé par une ceinture nouée à la taille par un nœud floché. Il tient de la main gauche un livre ou un étui à stylet.
L’artiste acquiert l’œuvre très tôt, puisqu’on l’aperçoit sur un cliché daté d’environ 1900 (MBPV3622), derrière Marie Bermond, peintre et amie de Bourdelle, dans l’atelier de peinture. Bourdelle installe l’œuvre sur le rebord de la cheminée, comme on le note sur deux portraits de l’artiste, l’un par Henri Manuel (MBPH0077), approximativement du début des années 1910, l’autre par Pierre Choumoff (MBPH0217), postérieur à la première guerre mondiale.
L’œuvre inspire Bourdelle pour la figure de Saint Jean de la Pietà destinée au tympan de l’église Notre-Dame du Raincy (MBD7581 et MBPL3942). Une étude pour le tympan (MBD5383) reproduit fidèlement son visage. Bourdelle est inspiré par la lisibilité formelle des traits et le caractère graphique de la chevelure, dont il accentue l’aspect synthétique. Pour la composition d’ensemble du tympan, il retourne le profil du personnage, pour le placer à gauche. Dans le bas-relief (MBPL3942) l’artiste simplifie encore les traits et accentue le renversement de la tête.
Bourdelle ne restaure pas les œuvres de sa collection médiévale. Il aime en elles les écorchures du temps et décèle leurs lignes et volumes essentiels derrière l’usure du matériau.
Valérie Montalbetti Kervella
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