Première esquisse pour la Première victoire d'Hannibal

Antoine Bourdelle (1861-1929)

  • 1885
  • 31,5 cm x 24 cm
  • Archives Antoine Bourdelle. Cote : AB/C.Boite2-42

Cette esquisse précède la réalisation de l’une des sculptures de jeunesse d’Antoine Bourdelle, la Première victoire d’Hannibal (1885). Plusieurs dessins préparatoires, conservés au musée Bourdelle, donnent à voir le processus créatif de l’artiste. Dans cette « première » esquisse, les grandes lignes de sa composition sont déjà présentes : un enfant se dresse sur un socle, avec une jambe en retrait, et agrippe de ses mains un aigle aux ailes déployées. Il manque encore le jeu de pivot de la jambe gauche qui entraîne le mouvement de rotation de l’enfant, mais on peut lire dans la rapidité du trait toute la vigueur que Bourdelle souhaite insuffler à son groupe sculpté. Trois strates de la création bourdellienne se superposent dans ce dessin : le dessin préparatoire, l’écriture poétique et la réflexion sur le cadrage. 
Cette esquisse, brossée rapidement à l’encre de Chine, est accompagnée d’un texte de Bourdelle, où l’on retrouve son écriture enlevée et lyrique. Il semble énumérer les caractéristiques du futur groupe sculpté : « cheveux raides / tête brossée brutalement et vivement […] dans la grandeur dans / la rudesse dans la / sauvagerie […] ». Or, il est difficile de lire, dans la sculpture finale, ladite « sauvagerie » de cette scène tirée du roman Salammbô (1862) de Gustave Flaubert. L’œuvre, qui démontre bien la virtuosité du jeune artiste, donne surtout à voir l’influence exercée par le sculpteur Alexandre Falguière. Bourdelle vient alors de rejoindre l’atelier du maître en 1884. Cette sculpture permet au jeune élève d’obtenir la mention honorable au Salon des artistes français en 1885, alors qu’il n’est âgé que de vingt-quatre ans. Elle lui inspire plus tard plusieurs textes et deux poèmes (« Proses de tout temps », « Les rires d’Hannibal »). 
Cette étude est conservée dans un des cahiers bleus de Bourdelle. Constitués par l’artiste, ces cahiers comportent un florilège de dessins préparatoires, glanés et collés directement sur le papier, à la manière d’un répertoire illustré. Bourdelle met en scène son esquisse, grâce à un rehaut d’aquarelle, certainement postérieur, qui vient magnifier la silhouette victorieuse de l’enfant. Il ajoute également un cadrage fin, tracé à l’encre noire. Comme pour ses sculptures, Bourdelle délimite soigneusement un espace mais permet à l’œuvre de s’en extraire. Il accepte que le papier sorte du cadre, et ce débord, ainsi que la mise en page - qui joue adroitement des vides et des pleins -  viennent révéler l’évolution du regard de l’artiste sur toutes les étapes de son travail.  

Lili Davenas


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