Notre-Dame de Reims sous les obus

Emile Antoine BOURDELLE (1861, Montauban (Tarn-et-Garonne, France) - 1929, Le Vésinet (Yvelines, France))

  • 1917
  • Crayon à la mine de plomb et aquarelle sur papier
  • 51,3 x 40,5 cm
  • MBD1023.1

Aux prémices de la Première Guerre mondiale, Bourdelle est profondément choqué par le bombardement de la cathédrale de Reims. Le 19 septembre 1914, vingt-cinq obus frappent l’édifice et détruisent la résidence des archevêques, appelée le Palais du Tau.

L’artiste s’émeut de ces destructions et y consacre un vaste ensemble de cent-vingt dessins, dont celui-ci. Bourdelle cherche à conjurer l’évènement historique par une main divine. La plupart des dessins de cette série se construisent autour de l’intervention salvatrice d’une figure religieuse ailée auprès d’une œuvre sculptée détruite. Attaché au travail artisanal par ses racines, Bourdelle conserve la mémoire des artisans et de leurs créations détruites par l’œuvre graphique.

Il développe ici non pas l’iconographie de l’archange protecteur sauvant les statues de la destruction, mais celle d’une figure religieuse consolatrice. Deux figures saintes se pressent autour d’une représentation sculptée de la Vierge à l’enfant, jumelle dessinée de celle du trumeau du portail occidental de la cathédrale. Ces deux figures ne l’enlacent pas pleinement, laissant simplement reposer leurs corps contre la statue.

L’artiste accompagne sa figuration d’un ciel sombre et nuageux, suggérant les bombardements sans les représenter explicitement. Rares sont les œuvres de cet ensemble présentant frontalement l’attaque, hormis Archange gardant un des Rois de Notre Dame de Reims pendant l’incendie (n° d’inv MBD1117), où des langues de feu pourlèchent le bas de la page, menaçant la figure du roi sculpté.

De nombreux éléments témoignent de l’attachement de Bourdelle à ce monument : l’organisation d’une visite avec ses étudiants en 1910, relatée dans Cours et leçons à l’Académie de la Grande Chaumière, la possession de plusieurs ouvrages consacrés à ce sujet dans sa bibliothèque, ou la constitution d’une collection de moulages de figures de la cathédrale.
Les critiques, rares pour cet ensemble qui ne donna pas lieu à une publication, soulignent cependant le choix d’exalter le mysticisme des ruines, au mépris d’un regard purement documentaire.

Ainsi, dans Comœdia, Albert t’Serstevens écrit à propos de ces dessins « Il n’est pas nécessaire, pour figurer nos victoires, d’aligner des poilus, flingots en main, ou traînant des 75, d’élever des pyramides hérissées de baïonnettes ».

Charlotte Azam

L’oeuvre sur le portail des collections

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